Les 40 ans de La Traversière

Sunday January 21st, 2024 | Actualités

Fondée en 1983, l'Association Française de la Flûte – La Traversière – vient tout juste de célébrer ses 40 ans d’existence. Née de la passion partagée d'une poignée de flûtistes lyonnais, elle a rapidement grandi et évolué au fil des décennies en multipliant ses initiatives : informer, rassembler, publier, concevoir et organiser des événements, puis produire des enregistrements, développer des partenariats, plus récemment soutenir des projets et commander de nouvelles œuvres, avec une volonté permanente d’ouverture, de regarder vers le futur en même temps que mettre en valeur et cultiver l’histoire de l’instrument, de son répertoire et de ses interprètes.

Afin de revenir avec précision sur son histoire, laissons tout d’abord la parole à Rémy Weber, un des membres fondateurs, au sujet des origines.

Lettre de Rémy Weber


L’association La Traversière a 40 ans !

Quel bel âge ! Celui de la maturité, de l'épanouissement ! Je profite de cet anniversaire pour vous relater quelques souvenirs de sa tendre enfance. Ce fut pour Michèle Weber et moi notre premier « bébé », issu d'une famille multi parentale, en 1983 !
Il y eut la naissance, autour d'une table réunissant des flûtistes passionnés, dont de jeunes professeurs et des amateurs. Ce soir du 22 janvier 1983, cette bande d'amis décidèrent d'une petite folie : créer une association dans le but de mettre en réseau les flûtistes « traversiers », afin de communiquer et partager les informations autour de notre instrument et le promouvoir.
Cette folie prit corps après une première décision financière : 50 francs furent généreusement déposés par chacun sur la table pour doter ce bébé d'un premier capital indispensable à sa vie. La 1re année, je pris le poste de Trésorier, Michel Girer fut Président, Nicolas Bange responsable du journal Traversières.
Le but était alors de tisser des liens entre ceux que la flûte passionne, depuis notre région lyonnaise jusqu’au reste du monde, d’organiser des stages, d’informer aussi bien sur la musique ancienne que sur les créateurs et les nouvelles techniques de son ou de facture, les nouveautés discographiques ou la critique de partitions pédagogiques avec leur classement par difficulté, de promouvoir un jeune concertiste ou un compositeur d’aujourd’hui, traduire un article d’une association étrangère… sans oublier la précieuse liste récapitulative des stages d’été, en un temps ou la communication et les informations ne circulaient pas comme aujourd’hui… ! L’interaction entre les adhérents et leur association était alors primordiale pour réussir cette aventure.

L’année suivante, Michel Girer partit hors de France pour son travail, je pris le poste de Président. Certes nous avions un titre officiel, mais la grande majorité du travail était réalisée notamment par Blandine Busseuil, Pascale Batut, Françoise Vial, Véronique Bachs, Michèle Weber, Nicolas Bange, Yves Charpentier, Marc Fournel ...
Cette belle équipe donna beaucoup de son temps pour que cet enfant grandisse.
Nous utilisions toutes les formes de communication pour nous faire connaître y compris la participation à un 1er salon des associations en 1983 à Lyon.
Le journal (« Traversières Journal ») nous occupa fortement, de par la rédaction d'articles mais aussi plus prosaïquement : frappe à la machine à écrire, photocopie, agrafage, collage de timbres, mise sous enveloppe … tout cela notamment dans une petite mansarde de bonne, que nous avions louée à la Part Dieu, au bout de 2 ans d’envahissement à notre domicile. Ce fut notre siège, une ruche certains jours !
Sophie Dufeutrelle fut élue vice-présidente en 1985, et fut responsable du 1er forum. Son extraordinaire dynamisme nous permit de franchir un nouveau palier. Elle devint présidente en 1986, d’autres membres actifs nous ont rejoints, on ne peut tous les citer !

Forum de villeurbanne avec Charles Tripp - Les flutes du monde
Forum de villeurbanne avec PY Artaud
Forum de villeurbanne avec Salvatore Faulisi

La Traversière n'aurait pu grandir sans l'appui d'artistes de premier plan qui nous ont soutenus et encouragés, comme Pierre Yves Artaud qui crut de suite à cette aventure et fut chargé des relations publiques, ainsi que ceux qui acceptèrent de jouer sans cachet ou avec un cachet minime. Le premier d'entre eux fut Christian Lardé, flûtiste remarquable d'une très grande humanité, puis Maxence Larrieu, Marc Fournel, Patrice Bocquillon, Robert Thuillier, Michel Debost, Stephen Preston, Alain Marion, Aurèle Nicolet, Trevor Wye, Serge Saitta, et bien d’autres…
Notons également le soutien de Jean-Pierre Rampal, rencontré en 1988 lors du 1er symposium de Nice (où nous avions un stand d’exposant !) et qui accepta de nous prêter son nom et de devenir le président d’honneur.
Lors des « Forums » Lyonnais (Villeurbannais exactement) qui rassemblaient tous les 2 ans des centaines de flûtistes de France : Lyon devenait capitale ! Ces forums nous ont procurés autant de nuits blanches que de plaisir. La Traversière progressait en membres : la demande de partage et de découverte était grande, notre travail était récompensé.
À titre d’anecdote, en 1986, au 2e Forum, un certain Emmanuel Pahud – alors en terminale – était venu en masterclasse rencontrer Michel Debost et lui jouer la Sonate de Prokofiev. On avait alors été « scotchés » par ce p’tit jeune tellement incroyable, qui nous décoiffait également lorsqu’il essayait des flûtes ! Et oui, on s’en souvient encore ... !

Forum de villeurbanne 1986 - Michel Debost et Veronique Barreau (piano)
Forum de villeurbanne 1988 - B Kuijken et M Hantai
Forum de villeurbanne 1988 - Jean-Louis Beaumadier

La recherche d'appuis financiers était une quête permanente, et combien de fois je profitais de voyages professionnels à Paris pour vendre, le soir avant de reprendre mon train, des encarts publicitaires à des éditeurs ou à des facteurs. Les annonceurs les plus importants et fidèles furent sur la période 1983-1990 : Arlod, Leduc, Billaudot, J.Y Roosen, Salabert, Lemoine, Yamaha. Et une mention particulière doit être accordée aux Éditions Billaudot qui proposèrent en avril 1988 de prendre en charge l’impression du journal !

Je ne voudrais pas oublier de vous confier qu’une fée s'était penchée sur le berceau de la Traversière. Grâce à une relation de Michèle rencontrée en stage avec Christian Lardé (et un bon dossier !) une grande fondation nous a doté du 1er ordinateur Macintosh (coût en 1985 : 26 000 francs !) et cette informatique nous a considérablement aidé dans la fabrication du journal et dans la gestion de l'association.
Mais, en 1990, les membres actifs eurent des signes de fatigue (et de jeunes enfants !) … et nous avions la conviction qu’il fallait encore faire grandir ce petit de 7 ans ! C'est à ce moment-là que les premiers contacts s'établirent avec Denis Verroust, rencontré inopinément dans la boutique parisienne de « La Stravaganza » de Cécile Bécret, rue Traversière (un signe !). Très vite, en 1990, ce passionné prit avec brio les rênes de l'association avec sa propre équipe, et le journal sous le titre Traversières Magazine l’année suivante.
Nous lui apportions une trésorerie saine, près de 400 adhérents, un outil informatique, un journal, le concept des forums, fiers que tout notre travail de plusieurs années permette aussi de créer un poste parisien à mi-temps ! Je pense que vous tous connaissez ensuite la progression de la Traversière sous la houlette du merveilleux Denis Verroust et de toute une équipe de nouveaux noms qui ont travaillé à leur tour !
Les Lyonnais furent certes un peu tristes de constater que souvent les conditions d'une croissance et notamment à l'international passent par Paris… mais nous fûmes tous fiers de voir la transformation de notre journal en un magazine sur papier glacé, le succès des Conventions (auxquelles nous nous rendons toujours, avec un immense plaisir et beaucoup d’admiration) et d'avoir pu créer la première « association française de flûte » à l'instar des anglais et des américains qui préexistaient avant nous. Comme d’autres flûtistes dynamiques dans d’autres régions, la même bande d’amis est restée active sur le plan local, créant par la suite l’association « Tutti-Fluti » et « l’Orchestre des Flûtes du Rhône » !
En 1983, nous n’imaginions pas qu’après le bel élan que nous donnions, la Traversière fasse une si belle carrière, réunisse autant de monde dans ses événements publics, produise autant d’articles de référence, rassemble une équipe toujours aussi magnifique et efficace sachant s’adapter au tourbillon des évolutions techniques et sociétales où l’information prolifère ! Je lui souhaite de tout cœur de continuer longtemps, portée par la compétence et la générosité de passionnés !

Rémy Weber
Trésorier à la création en 1983
Président en 1984, 1985
Vice-président de 1986 à 1990

Cette lettre de Rémy Weber donne un bon aperçu de ce que peut être la fondation d’une telle association, et notamment de l’enthousiasme nécessaire afin de surmonter toutes les difficultés – administratives, logistiques, rédactionnelles… L’équipe lyonnaise avait patiemment et parfaitement su construire son parcours, fidélisant les soutiens et organisant de premiers événements rassemblant des artistes de multiples horizons, illustrant aussi bien la flûte contemporaine que la flûte classique, tout comme les instruments anciens ou les flûtes du monde.

Si j’avais en effet rencontré Rémy Weber lors d’un de ses passages à Paris dans les années 1980, ce n’est que plus tard, en 1990, que je reçus un appel de Jean-Yves Roosen me disant que l’équipe lyonnaise souhaitait passer la main, pensant que l’association aurait davantage de chances de se développer encore si elle se situait en région parisienne. J’étais très honoré qu’ils aient pensé à moi, mais je devais également vite mesurer la chance qui était la nôtre car La Traversière disposait d’une réserve financière assez confortable qui permettait en l’occurrence de tenter le pari d’un magazine plus développé, à l’image de ceux des associations américaine, allemande ou italienne.

Afin de m’occuper plus spécifiquement de la publication, j’avais demandé à mon ami Christophe Brandon, grand passionné, de prendre la présidence de l’association. Philippe Legrand était vice-président, André Huber trésorier et Christophe Mège secrétaire. Sophie Dufeutrelle, Philippe David, Gilles de Talhouët et Pierre-Yves Artaud faisaient également partie du Conseil d’Administration. Nouveau logo, nouvelle présentation avec couverture en quadrichromie, nouveau titre et nouveau format de 64 pages : Traversières Magazine se révéla d’emblée une aventure à part entière ! Et une aventure parfois risquée : au-delà de la mise en page et de l’impression, les coûts postaux devenaient bien plus importants, d’autant que des exemplaires furent envoyés gratuitement à quantité d’enseignants afin qu’ils puissent découvrir la publication. Quant au service de presse, il incluait non seulement la plupart des plus grands flûtistes mais également toutes les principales librairies musicales, y compris parfois en Suisse et en Belgique. L’entreprise porta rapidement ses fruits, les annonceurs nous suivirent et le nombre d’adhérents augmenta régulièrement jusqu’au millier. Parmi les annonceurs les plus fidèles, il faut ajouter à ceux déjà mentionnés par Rémy Weber La Stravaganza et Allain Cadinot, qui ne manquèrent pas un seul numéro depuis 1991 !

Les années 1990 et 2000 représentèrent pour Traversières Magazine une période véritablement bénie. De par la redécouverte de nombreux répertoires anciens et la volonté de popularisation de la musique contemporaine, les éditions étaient en plein essor. Le CD vivait lui aussi un âge d’or, illustrant à merveille toutes ces découvertes et redécouvertes, offrant un florilège de premières rééditions et bâtissant un patrimoine culturel de premier ordre. Enfin, ces deux décennies continuaient à voir éclore de nombreux jeunes solistes à l’avenir prometteur en même temps que se poursuivaient les carrières des plus grands virtuoses de la seconde moitié du XXe siècle.
Organisé autour d’un entretien avec une grande personnalité suivi de sa discographie complète, chaque numéro comprenait un « Dossier », un ou plusieurs articles et diverses rubriques consacrées à la facture instrumentale, au répertoire, à la pédagogie, au jazz, à la flûte contemporaine… Mais certaines se distinguèrent d’emblée par leur originalité, à l’image de celle proposée par Gilles de Talhouët et intitulée Les écrivains aiment la flûte, commentant les textes les plus divers dans lesquels la flûte était présente et les reliant à telles ou telles musiques.

D’autres contributions se révélèrent particulièrement remarquables et donnèrent un cachet des plus enviables à la revue. On pense notamment à la rubrique sur les études, animée par Emmanuel Hondré, et surtout aux fameuses Histoires de flûtistes proposées par Bernard Duplaix, articles développés et superbement documentés dont la lecture semblait faire littéralement revivre quantité de musiciens de l’époque 1870 – 1970 environ, connus ou pas : Gaston Blanquart, Léon Fontbonne, Louis Fleury, Fernand Dufrène, Adrien Girard ou encore Lucy Dragon et tant d’autres passionnaient tout le lectorat.

Dès 1992, deux circonstances nous incitèrent à organiser un premier grand événement : le 70e anniversaire de Jean-Pierre Rampal coïncidait en effet avec l’institution de l’Union Européenne… De tels éléments plaidaient en faveur d’une manifestation de grande ampleur, mais se lancer dans une aussi ambitieuse organisation avait de quoi intimider. Alain Marion nous encouragea Christophe Brandon et moi, et nous franchîmes le pas. Le CRR de Saint-Maur-des-Fossés en région parisienne (94), dont le tarif de location était acceptable, offrait un cadre idéal pour les concerts mais tout autant pour les exposants. Alors que les conventions auxquelles nous avions assisté à l’étranger rassemblaient toujours ces derniers dans une grande salle irrémédiablement transformée en une volière épouvantable, nous avions là l’occasion d’offrir une disposition à 1, 2, 3 ou 4 exposants par salle suivant les cas, permettant de bien meilleures conditions pour les essais des instruments, les rencontres, discussions, etc. Les couloirs étant relativement longs, une signalétique rectiligne était synonyme de repérage facile pour tous les visiteurs. Ainsi purent se tenir les Rencontres Européennes de la Flûte en juillet 1992, invitant des représentants de chaque pays d’Europe ou presque en leur suggérant spécifiquement des programmes mettant en valeur leur répertoire national. Sur quatre jours, le pari était quand même un peu risqué pour une nouvelle équipe active depuis un an et demi à peine. Mais je me rappelle encore le soulagement et la joie à la vue de l’immense file d’attente devant le Conservatoire de Saint-Maur avant même 8h du matin !! En l’honneur de Jean-Pierre Rampal, le concert de clôture avait été programmé à Paris et se tint dans une Salle Gaveau pleine à craquer. La semaine du 14 juillet !! On nous avait presque ri au nez quand on avait signé le contrat de location !

Radio Classique avait accepté de diffuser tous les concerts de ces Rencontres, ce qui marqua la naissance d’un partenariat avec cette station. Ils me firent confiance pour concevoir de nombreuses émissions – environ 200 – sur la flûte, les vents et leurs interprètes, présentées sous l’égide de La Traversière, et la rémunération de ces émissions permit notamment le financement des premières heures de secrétariat. Au même moment fut mis en place un système d’Offres Spéciales sur 3 CDs par numéro, qui permit à d’innombrables flûtistes de se constituer une discothèque de qualité exceptionnelle à coût réduit.

Affiche de la Convention 1996
J’avais remplacé Christophe Brandon au poste de Président fin 1992, et ce n’est que quatre ans plus tard qu’eut lieu la première Convention Française de la Flûte. D’une part le travail exigé par le magazine était essentiel, et il existait d’autre part des manifestations du même genre dans des pays proches tels que l’Allemagne, l’Angleterre et l’Italie, auxquelles les flûtistes français pouvaient aisément se rendre. Mais surtout, il me semblait important de laisser une période suffisante entre deux grand événements, au moins pour deux raisons : laisser le temps à de nouveaux talents d’apparaître et aux éditions de proposer suffisamment de nouveautés, et pouvoir illustrer durant la Convention les artistes interviewés et sujets traités dans la revue durant les 4 années précédentes. La Convention de 1996, toujours à Saint-Maur, s’avéra elle aussi une réussite et fut au passage l’occasion de lancer la collection de disques de l’association, « Traversières Flûte Collection ». Inaugurée avec les concertos pour 5 flûtes de Joseph Bodin de Boismortier par Barthold Kuijken et ses élèves Marc Hantaï, Serge Saitta, Frank Theuns et Danielle Étienne ainsi que par les Trios de François Devienne pour 3 flûtes avec Jean-Pierre Rampal, Alain Marion et Claudi Arimany, elle offrait ainsi d’emblée les deux aspects baroque & moderne et les artistes étaient présents avec ces programmes pour l’événement.

Affiche de la Convention 2000
L’envers du décor ? Le travail était épuisant. Il fallait sans cesse courir après le temps, sans cesse relancer… quasiment ni week-end ni vacances, et les coûts restaient très lourds. Mais l’équilibre financier tenait malgré tout et il fut même possible d’engager une secrétaire à temps partiel. Le poste était indispensable, et parmi les personnes qui l’occupèrent, Bénédicte Lachavanne (de 1993 à 1996) – assistée d’Élie Cohen en tant que trésorier – est certainement celle à qui La Traversière doit le plus, grâce à son dévouement, son enthousiasme et son efficacité. Victime d’un très grave accident de la route en décembre 1996, elle ne put reprendre le travail et son départ marqua le début d’une période délicate, même si toutes les énergies restaient mobilisées. Le décès tragique d’Alain Marion au cœur de l’été 1998 ouvrit de plus des années difficiles émotionnellement parlant, Jean-Pierre Rampal disparaissant à son tour deux ans plus tard, le 20 mai 2000. La seconde Convention fut organisée cinq mois plus tard en son honneur, et malgré un temps de préparation très court, se voulut d’une dimension particulière : 5 jours, cette fois, virent se rassembler des flûtistes du monde entier, avec un concert de clôture dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne.

Passé cet événement, ce fut à mon tour de souhaiter passer la main et La Traversière, d’abord domiciliée chez moi à Vincennes, déménagea à Paris pour occuper un petit espace dans les locaux de l’U.F.A.M., rue du Dôme. Gérard Bourgogne était devenu Président, Jasmine Staadal était arrivée en tant que secrétaire et Pascal Gresset m’avait succédé en tant que rédacteur en chef. J’eus l’occasion de travailler avec lui en reprenant brièvement la présidence de 2001 à 2004, et son extraordinaire culture, sa passion et son talent dans l’écriture lui permirent de porter la revue plus haut encore, avec parfois plus de 80 pages et bon nombre de grands dossiers de référence, qu’il s’agisse de Jindrich Feld, Jean Françaix, la flûte chez Mozart… Il faut en outre rappeler que dès 1991, Traversières Magazine avait régulièrement produit des numéros doubles ou numéros spéciaux : sur des interprètes comme Aurèle Nicolet (1996), Jean-Pierre Rampal (1997), Alain Marion (1998, 2018), Maxence Larrieu (2014), Roger Bourdin (2016), Raymond Guiot (2020) ou des compositeurs aussi divers que Saverio Mercadante, André Jolivet et Yoshihisa Taïra (1995, 2005), Franz et Carl Doppler (2018)…

Les enregistrements de La Traversière s’étaient eux aussi bien développés, essentiellement sur instrument moderne mais également sur flûte baroque, avec de grands solistes, des répertoires à découvrir, etc. Ultime gravure d’Alain Marion, le double-CD des 8 sonates pour flûte de Beethoven d’après les sonates pour violon s’étaient même vu attribuer le Diapason d’Or en 1999. La collection comptait jusqu’à 14 titres lorsque Pascal Gresset reprit la présidence en 2004, mais souhaitant se consacrer exclusivement au magazine, il préféra la céder l’année suivante à l’Association Jean-Pierre Rampal que je venais de fonder, afin qu’elle puisse s’épanouir encore davantage.

Une période de transition s’ensuivit après le départ de Pascal Gresset en 2007, durant laquelle la présidence fut assurée d’abord par Jean-Luc Abras puis par Olivier Pédan, avant l’arrivée de Pierre-Yves Artaud. La situation financière, quoique toujours saine, restait fragile et le magazine connut exceptionnellement une parution un peu irrégulière avant que ne s’installe une nouvelle équipe pour cette publication, notamment sous la houlette d’Olivier Pédan. Une troisième Convention fut cependant organisée en 2008, toujours à Saint-Maur, célébrant le 10e anniversaire de la mort d’Alain Marion.

Affiche de la Convention 2008
Masterclasse avec Rachel Brown
Concert avec Rachel Brown et Alexis Kossenko

L’UFAM ayant vendu son local parisien en 2005, l’association s’était alors trouvée domiciliée chez Pascal Gresset à Saint-Clair-sur Epte, puis revint en région parisienne dans un local HLM d’Ivry-sur-Seine. Pierre-Yves Artaud fut élu Président en 2011 et La Traversière déménagea un peu plus tard une nouvelle fois, pour Vitry-sur-Seine. Sa présidence fut marquée par une forte volonté d’organisation, ce qui permit de remettre Traversières Magazine sur sa lancée, et ce d’autant mieux lorsqu’arrivèrent au poste de rédactrices en chef Isabelle Parès puis Lucie Humbert. Les deux conventions qui seront alors organisées – et rebaptisées Conventions Internationales – se tiendront cette fois dans des lieux différents. Celle de 2012, en hommage à L’héritage de Paul Taffanel et à l’art de la flûte française, se déroula au CRR de Paris rue de Madrid et vit notamment la première venue de Sir James Galway dans cet événement. La suivante, en 2016, eut pour cadre le Conservatoire de Levallois-Perret (92). Souhaitant offrir encore davantage de choix pour les visiteurs, les programmations de Pierre-Yves Artaud avaient cette fois opté pour diverses propositions de concerts, classes ou ateliers en parallèle, et une part plus importante fut attribuée aux flûtes du monde. Restreignant au maximum les coûts, la Convention Flute Spirit de 2016 permit exceptionnellement de nettement renflouer les caisses de l’association dans un contexte économique de plus en plus difficile.

Enfin, depuis le départ de Pierre-Yves Artaud en 2017, c’est aujourd’hui Franck Masquelier qui préside aux destinées de l’association, entouré d’une équipe dans laquelle chacun a bien trouvé sa place, en particulier Thomas Mallet pour la gestion du site internet, Marie-Jacques Poinsteau en tant que trésorière, Patricia Kraeutler et Claude de La Taille pour les relations avec exposants, ainsi que Cécile Bruned, qui avait succédé en 2021 à Lucie Humbert au poste de rédactrice en chef du magazine. Celui-ci est aujourd’hui unanimement apprécié pour la variété et la qualité de son contenu et offre mais l’association a en outre élargi ses champs d’action : une collection de partitions a vu le jour chez Robert Martin, plusieurs commandes ont été passées à des compositeurs tels que Nicolas Bacri, Guillaume Connesson ou Florentine Mulsant, et j’ai même pu avoir la chance de voir ma biographie de Jean-Pierre Rampal publiée pour la première fois conjointement avec La Traversière et l’AJPR, à l’occasion de la 6e Convention Internationale de la Flûte à l’automne 2022 à Aix-en-Provence, spécialement en hommage au grand flûtiste en célébration du centenaire de sa naissance. Ce livre n’était cependant pas le premier édité par La Traversière puisque dix ans auparavant était parue la traduction en français du livre d’Edward Blakeman sur Paul Taffanel.

Affiche de la Convention de 2022 - Aix-en-Provences
Première Convention organisée en région, cette manifestation – reportée de 2 ans en raison de la pandémie de Covid-19 – rencontra un formidable succès et proposa cette fois davantage d’ateliers participatifs qui permirent à de nombreux jeunes de s’y exprimer. Bénéficiant de l’investissement de tous les conservatoires de la région, elle contribuera certainement au développement d’actions futures avec tout le réseau des enseignants du pays. Cela avait d’ailleurs déjà été le cas lorsque fut monté en 2019 le premier Flutissimo, événement limité à un week-end et permettant de rassembler les flûtistes indépendamment des grandes Conventions. Tenu à Lille, il avait notamment permis de belles rencontres franco-belges grâce à la présence d’Aldo Baerten, Toon Fret, Marc Grauwels et Peter Verhoyen. Le suivant eut lieu à Versailles en fin d’année dernière, cette fois en souvenir de Roger Bourdin, né 100 ans plus tôt.

Et au chapitre des nouveautés doit de même être signalée la Scène Numérique, série de videos exclusives mises en ligne durant les périodes de confinement, notamment afin de pallier l’absence d’événements.

Flutissimo Lille - 2019
Flutissimo 2019 à Lille
Flutissimo 2023 à Versailles

La Traversière est consciente des difficultés à surmonter. Le contenu du magazine ainsi que son modèle économique posent de nombreuses interrogations, et l’organisation des événements devient de plus en plus complexe. La facture instrumentale s’est trouvée grandement fragilisée lors de la récente pandémie, et internet a aujourd’hui quasiment détruit le monde de l’édition musicale et discographique classique. Quant aux budgets culturels, ils se réduisent d’année en année, les perspectives de grandes carrières pour des instrumentistes à vent disparaissent peu à peu, et les répertoires éprouvent paradoxalement des difficultés à se renouveler. La popularité de la flûte, contrairement à ce que certains pensent, est loin d’être ce qu’elle était il y a une cinquantaine d’années…

Bien des défis attendent votre association, soutenez-là à la mesure des efforts qu’elle déploie pour vous !!

Article proposé par Denis VERROUST

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Denis VERROUST a fait ses études de flûte sous la direction de Pierre Paubon, Ida Ribera, Régis Calle et Francis Gabin. Titulaire du DE puis du CA de flûte, professeur depuis 1980 au Conservatoire de Palaiseau (91), il partage son temps entre l’enseignement, les concerts et les recherches musicologiques. Il a eu l’occasion de jouer en soliste avec Jean-Pierre Rampal, Claudi Arimany et Philippe Bernold, et a réalisé plusieurs enregistrements. Participant à diverses éditions (Billaudot, La Stravaganza) et auteur de nombreux articles sur la flûte, il a conçu les récents dossiers « flûte » de La Lettre du Musicien et collaboré à de nombreuses émissions radiophoniques. Rédacteur en chef de Traversières Magazine durant dix ans (1991-2000), il a été Président de La Traversière durant près de 15 ans (jusqu’en 2004), et a organisé les Conventions Françaises de la Flûte en 1996, 2000 et 2008. Président de l’Association Jean-Pierre Rampal (AJPR) qu’il a fondée en 2005, il a écrit de nombreux articles sur ce grand artiste et réédité nombre de ses enregistrements. Sa conférence “Jean-Pierre Rampal, le premier virtuose moderne” a déjà été présentée à plus de 40 reprises y compris à l’étranger, et d’autres sont à présent proposées sur Maxence Larrieu, Aurèle Nicolet et Roger Bourdin.

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